logo-impression
  • Posté le 19 mars 2010.

PFR : l’arbitraire tous les mois sur votre feuille de paye !

Qu’est-ce que la PFR ?

PFR = Prime de Fonction et de Résultats (décret n° 2008-1533 du 22 décembre 2008)

Le décret précise que le bénéfice de la PFR est ouvert à l’ensemble des membres du corps des attachés et des corps analogues (régis par le décret n° 2005-1215 du 26 septembre 2005) au plus tard au 1er janvier 2012.

C’est l’instauration d’un salaire individualisé arbitrairement !

Qu’est ce que la PFR ?
La PFR est un dispositif indemnitaire qui comprend deux parts cumulables et modulables indépendamment l’une de l’autre par application de coefficients multiplicateurs à un taux de référence (exprimé en euros) :
 une part liée aux fonctions exercées, modulable de 1 à 6 pour tenir compte des responsabilités, du niveau d’expertise et des sujétions spéciales liées aux fonctions exercées. Cette part repose sur une typologie des postes (maillage large de 4 à 6 catégories par grade).
 une part liée aux résultats individuels, modulable de 0 à 6 pour tenir compte de la performance et de la manière de servir de l’agent. La modulation intègre, sur cette part, l’atteinte ou non par l’agent des objectifs qui lui ont été fixés.

Si le montant de la part fonctionnelle a vocation à rester relativement stable dans le temps, le montant de la part liée aux résultats individuels attribué à un agent est révisable en fonction des mérites et des résultats.

ANALYSE CGT

Le nouveau système institue des primes individualisées, en deux parties, en fonction du poste occupé et en fonction des « résultats individuels ».

Les montants affichés sont supérieurs à l’ancien système. Mais, les affichages seront loin de la réalité. Chaque poste sera ainsi coté de 1 à 6, la prime au « résultat », elle, variera de 0 (aucune prime versée) à 6 parts... Beaucoup dépendra des priorités politiques du moment et des moyens propres à chaque ministère... Tel poste côté le sera-t-il demain ? Rien n’est moins sûr...

Ce système va amplifier considérablement la part variable du salaire à l’instar de ce qui existe déjà dans le secteur privé.

Surtout, il va introduire dans la Fonction Publique une logique de travail au rendement avec, la plupart du temps, des critères antagoniques aux missions du service public.

Le financement serait assuré par le non remplacement d’un départ en retraite sur 2 et donc par une fragilisation du service public rendu à l’usager. Le cannibalisme administratif n’a donc aucune limite !


PFR : un autre mauvais coup annoncé par le rapport Silicani

Le Livre Blanc sur l’avenir de la Fonction publique du rapporteur Jean-Ludovic Silicani aurait également pu s’appeler « Pour en finir avec les fonctionnaires ».

Son but est d’introduire le « New public management »* ultra-libéral dans les gestions des personnels de l’administration à la suite de la LOLF qui l’a introduit dans la gestion financière et stratégique.

Il ne faut surtout pas faire l’erreur de considérer qu’il s’agit « d’un rapport de plus » qui ira s’entasser avec les autres au fond d’une armoire.
Au contraire, la rapidité avec laquelle les mesures régressives qu’il préconise (loi sur la mobilité, remplacement de la notation par la seule évaluation, mise en place de la PFR, mutations uniquement « au profil »...) doit inciter chaque fonctionnaire à le relire fréquemment afin d’anticiper les prochaines attaques.

* voir l’article « nouvelle gestion publique » de l’encyclopédie Wikipedia (version du 24 janvier 2010 à 23:37) et sa bibliographie


Une part variable de tous les dangers

Les primes aux résultats vont dépendre de l’entretien individuel d’évaluation et seront arrêtées par le chef de service.

Le CTP n’a pas la compétence pour se prononcer sur le traitement des situations individuelles, ni sur les montants individuels effectivement versés. Autrement dit, le fonctionnaire qui verrait son traitement baisser via la PFR, ne pourra aucunement avoir recours aux syndicats.

Si la notation/évaluation antérieure était parfois injuste envers l’agent, elle avait au moins le mérite de ne mettre dans la balance que des appréciations littérales incohérentes et des délais de réduction moindres. De plus, l’agent noté pouvait faire un recours en notation sur la note chiffrée et les appréciations qui pouvaient être modifiées tant niveau des CAP-DI que des CAP Centrales. En Douane, le remplacement de la notation par un simple entretien s’apparente à un prélude pour la mise en place de la PFR.

Dans le cadre de la PFR, l’agent ne pourra que constater la baisse jusqu’à 40% de son salaire, sans aucun recours possible !!! Le fonctionnaire va donc se retrouver seul face à l’arbitraire de l’État employeur. Cela n’est pas sans rappeler la situation antérieure au statut de 1946.

A quoi est due cette variabilité ?
 « Limitée » à 40% de la PFR (contre 5% au maximum aujourd’hui), elle pourrait à terme en représenter jusqu’à 80% pour certains grades (20% de la rémunération totale) si les préconisations du rapport Silicani sont suivies jusqu’au bout.
 Tout porte à croire qu’elle sera gérée dans le cadre de quotas : si vous aimez les ré-partitions contentieuses et les réductions de durée d’échelon distribuées à l’évaluation, vous allez adorer la PFR ! Entre la Performance, la course effrénée aux objectifs et la mise en place d’une PFR, par essence inégalitaire, le climat déjà pesant dans les services, risque de devenir à terme explosif !!!
 Le niveau de « performance » sera jugé en fonction d’objectifs préfixés (comme préconisé dans le « Livre Blanc »). La course au chiffre et son cortège de souffrance au travail reposera ainsi plus directement encore sur chaque agent en introduisant une individualisation radicale des rémunérations.

Mise en place de la PFR en Douane ? … CAP 2012 !

A la place de quelles primes ?

La PFR a pour objectif de remplacer toutes les primes actuellement versées (IFTS, prime de rendement, ACF, prime informatique, primes ministérielles dont l’IMT etc.).

Dans l’immédiat, la NBI pourra se cumuler avec le versement de la PFR, mais dans un futur non déterminé, la NBI a vocation à être intégrée à la part fonctionnelle...

Pour qui ?

Si dans un premier temps, la PFR est mise en œuvre à Bercy pour les seuls agents de la centrale (attachés principaux et attachés), elle a vocation à être étendue à tous les fonctionnaires des trois fonctions publiques (État, territoriale et hospitalière)

Quand ?

Pour l’automne 2010. Avec une mise en place générale pour 2012.

La PFR, nouvelle arme du gouvernement contre les fonctionnaires

Le gouvernement affiche au travers de la mise en place de la PFR, une volonté d’un traitement par filière de métiers en fractionnant la mise en œuvre de cette politique décrite dans le rapport Silicani avec 7 filières professionnelles.

La présentation par les ministres Woerth et Santini est idéologiquement libérale. Elle vise à faire croire qu’on va enfin reconnaître le travail des fonctionnaires, garantir leur pouvoir d’achat et mieux reconnaître les mérites individuels et collectifs.

L’employeur, plutôt que de revaloriser les grilles, a fait le choix de développer les primes, se dédouanant de ses responsabilités face aux régimes sociaux (sécurité sociale et retraite).

Derrière ce vœu de simplicité et surtout d’avancée sociale selon notre ministre, se cache une nouvelle attaque contre le droit à un fonctionnaire à une carrière normale, avec des avancées d’échelons, une grille indiciaire préétablie etc.


Rémunération « au mérite » des fonctionnaires : un constat d’échec à travers le monde

La démarche actuelle de généralisation de la PFR intervient à un moment où son évaluation au niveau international aboutit assez largement à un constat d’échec.

L’OCDE, que l’on soupçonne rarement d’être un repaire de gauchistes, mène des études fouillées depuis 2005 sur le sujet. Voici un extrait d’une synthèse du rapport « La rémunération liée aux performances dans l’administration » :

« La rémunération liée aux performances semble motiver une minorité des agents du secteur public, mais une vaste majorité d’entre eux ne la considère pas comme un élément stimulant leur motivation. Des enquêtes de grande ampleur menées auprès des personnels des ministères, notamment au Royaume-Uni et aux États-Unis, ont montré que malgré un large soutien en faveur du principe de l’établissement d’un lien entre la rémunération et les performances, seul un petit nombre d’agents estimait que les dispositifs en vigueur de RLP les incitaient à travailler davantage et nombreux étaient ceux qui pensaient que ces dispositifs constituaient une source de discorde. »

Un autre résumé de cet ouvrage, également publié par l’OCDE, est encore plus critique :

« De nombreuses études concluent que la RLP a une incidence restreinte - sinon négative - sur les performances.

(...) Les perspectives de carrière et de promotion et l’intérêt du travail exercé s’avèrent être les facteurs de motivation essentiels pour les fonctionnaires, loin de-vant l’incitation « rémunération à la performance ».

Contrairement à son objectif premier affiché, la RLP ne parvient pas à motiver la majorité du personnel de la fonction publique.

Malgré ces limites, l’intérêt porté à la rémunération liée aux performances n’a pas faibli durant les vingt dernières années. Il est paradoxal de voir que la plupart des observateurs s’accordent pour signaler les limites des politiques de RLP, mais que ces dernières continuent d’être introduites à une grande échelle dans les administrations centrales des pays de l’OCDE. (...) En tout état de cause, on peut légitimement se demander pourquoi l’on continue si largement à avoir recours à la RLP. » Le rapport suggère qu’il peut s’agir avant tout de « motivations politiques »...

Autres sources à consulter :
 Perspectives Gestion Publique (publication de l’IGPDE) - n°30, mars 2009 : « La rémunération à la performance est-elle efficace ? »
 « Le piège des primes », article de Maya Beauvallet, Alternatives Economiques, mars 2010


La PFR : un projet dangereux !

Derrière une pseudo-harmonisation positive vendue par la propagande gouvernementale, le système PFR définit un cadre mais, pour l’essentiel, ce sont les ministères qui vont définir et l’enveloppe de crédits et « les montants individuels qu’il entend verser et la marge de variation ».

Ce sont aussi les ministères qui vont définir « les modalités concrètes de traduction indemnitaire des résultats de l’évaluation ».

Il tente de faire miroiter des augmentations significatives des primes mais en fait les montants indiqués sont théoriques, les montants réels seront déterminés dans les ministères en fonction « des gains de productivité » réalisés, en terme clair du nombre d’emplois supprimés puisque la moitié de l’économie salariale doit, nous dit-on, revenir aux fonctionnaires sous forme d’augmentation des primes ou de mesures catégorielles.

Des garanties seraient données sur le maintien du montant des primes. « Le montant individuel de la part liée aux fonctions exercées ne devrait pas évoluer significativement dans les années suivant le basculement dans le régime PFR ».

Il ne sera sans doute pas possible de modifier radicalement les montants de primes mais qu’en sera-t-il dès le premier changement de poste, résultant soit d’une mobilité soit d’une restructuration de service ?

La prime aux résultats pourra être attribuée sous forme de « bonus » annuel ou trimestriel. Celle-ci sera totalement aléatoire et pourra être égale à zéro.

La réalité du système est de s’attaquer, sur la partie de la rémunération que représentent les primes, au minimum de garanties qui s’y attachent aujourd’hui.

La PFR : exemple d’application inégalitaire

Ainsi, avec la réforme, pour un attaché de centrale du premier niveau de grade, l’amplitude des primes ira de 2 600 à 25 800 euros, Cette amplitude est actuellement :
 Pour un attaché du MEEDEM (Ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de la Mer) de 7 800 à 18 000 euros,
 Pour un attaché du ministère de la Culture de 3 799 à 12 783 euros,
 Pour un attaché du secteur Solidarité du ministère des Affaires sociales de 8 260 à 12 390 euros,
 Pour un attaché de la Caisse des Dépôts de 13 618 à 23 419 euros,
 Pour un attaché du ministère des Finances de 10 500 à 18 500 euros.

Pour prendre le cas d’un attaché des services déconcentrés du MEEDEM, ses primes vont de 5 984 à 8 976 euros.

ANALYSE CGT

On voit que dans tous les cas, le nouveau régime accentue considérablement l’amplitude avec un minima très en dessous des situations existantes, et un maxi qui tient compte des situations les plus favorables.

Il précarise ainsi significativement un élément essentiel de la rémunération.
Dans l’exemple précité, l’amplitude va jusqu’à un écart de près de 3 000 euros par an !!! Mais si on regarde les autres corps de métier, l’amplitude peut aller de 5 à 10 000 euros annuels !!!

Pour combattre la PFR et ses conséquences,
un seul moyen !
TOUS EN GRÈVE
ET DANS LES MANIFESTATIONS
DÈS LE MARDI 23 MARS 2010

Expression du SNAD CGT sur la PFR - 19/03/2010

Réagir

L'espace de réaction aux articles est réservé aux adhérents de la CGT douanes.