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  • Posté le 18 décembre 2020.

Comité technique de la DI Auvergne-Rhône-Alpes : un boycott qui s’impose

Vous trouverez ci-joint la déclaration liminaire CGT - Solidaires - UNSA lue à l’ouverture du comité technique du 17/12/20, qui a été boycotté ensuite.

Monsieur le Président,

C’est en plein confinement que le Ministère a annoncé officiellement devant nos fédérations, le transfert de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE).

Cette mesure a depuis été « validée », sans réel débat et de façon expéditive, par nos élus de l’Assemblée Nationale et du Sénat.

En creux, c’est bien de la fin de notre rôle fiscal dont il est question. Après nous avoir d’ores et déjà enlevé notre casquette comptable, nous ne pouvons pas faire comme si de rien n’était.

Comme vous le savez, la perte annoncée du calcul, du contrôle et de la perception des taxes énergétiques par la douane est un véritable coup de poignard dans le dos pour notre administration en général et pour notre Direction Interrégionale en particulier qui va perdre son pôle « Énergies », qui a pourtant rapporté en 2019 7 milliards d’€ à l’État !
Non seulement entre 700 et plus de 2000 agents se trouvent directement menacés par cette soit-disant « réforme », mais en s’attaquant au cœur de l’équilibre entre la Douane « pure » et les Droits indirects, qui était de mise depuis 1993, c’est à court terme l’avenir de notre administration en tant que telle qui est menacé.

C’est inacceptable.

La perte de plusieurs dizaines de milliards d’euros de perception n’a d’autre but que celui de nous éliminer à terme.
Étions-nous incompétents dans cette tâche ? Absolument pas.
Était-ce une demande des opérateurs ? En aucun cas. Outre qu’il serait particulièrement choquant de voir des assujettis décider eux-mêmes qui devrait percevoir les taxes, ceux-ci souhaitent au contraire que le système existant reste en place, et s’inquiètent des problèmes qui ne manqueront pas de se poser au moment de la transition DGDDI / DGFIP.

C’est par une solidarité élémentaire avec nos collègues directement concernés que nous boycottons ce CTSD.
C’est par solidarité avec ceux qui vont devoir abandonner leur métier, qui vont voir leur service fermer, qui vont perdre leur emploi, à qui de vagues promesses de reconversion seront vites faites et probablement trahies tout aussi rapidement.

Mais c’est aussi pour nous, agents de la Direction interrégionale Auvergne-Rhône-Alpes, que nous ne siégerons pas aujourd’hui. Non seulement parce que les mutations seront encore plus compliquées avec moins de services disponibles, mais surtout parce que notre avenir à terme est plus que douteux au sein d’une administration qui, dans la foulée des Droits Indirects, va perdre aussi son réseau comptable et l’échelon des directions régionales, notre Direction Interrégionale jouant malheureusement le rôle de précurseur dans ce domaine avec la « reconfiguration » de la Direction Régionale d’Auvergne.

Quand il ne restera plus que quelques centres de dédouanement en France, serons-nous encore une administration au sens strict du terme ou ne serons-nous plus que de simples agences de dédouanement, pourquoi pas à terme déléguées à de quelconques entreprises privées ?

Fantasmes de syndicalistes ? Peut-être... mais ce schéma existe déjà dans certains pays, et des entreprises françaises se vantent même de leur savoir faire en la matière. Si elles peuvent le faire pour des États africains, pourquoi pas chez nous ? Ainsi, un des grands acquis de la Révolution, la nationalisation de la perception des impôts, aura été détruit, par ceux-là même qui n’ont que « les valeurs républicaines » à la bouche.

La Douane est, a toujours été, et devra toujours être une administration fiscale. La promesse d’échanger l’abandon des Droits indirects contre un renforcement de ce qui serait notre cœur de métier est une nouvelle preuve de la nov-langue actuelle. On ne dit plus guerre mais maintien de la paix, on ne dit plus licenciements mais plan de sauvegarde de l’emploi, on ne dit plus destruction de la douane mais recentrage sur la frontière. C’est d’autant plus simpliste que notre cœur de métier est la police de la marchandise bien plus que de la frontière en tant que telle.

C’est bien pour cela que nous sommes les plus à même de prélever toutes les taxes
pesant sur la marchandise. Alors que l’UE annonce des mesures de rétorsion contre
Washington et qu’un « no deal » se profile avec le Brexit, le rôle de la douane en tant que police des marchandises reste primordial. Ces mesures pourront représenter jusqu’à quatre milliards de taxes douanières sur des produits américains. C’est bien connu, le Code du Travail est trop épais, mais des traités de libre échange peuvent comporter des centaines de pages illisibles par le commun des mortels, sans susciter la moindre demande de simplification.

C’est toujours ce qui protège qui gêne, droit ou administration. D’ailleurs toutes les réformes que la Douane subit depuis près de 20 ans se sont escrimées à limiter les contrôles, le détruire à petit feu. Quelle ironie aujourd’hui quand on nous annonce que c’est le contrôle qui sauvera notre administration !

Pour les tenants du commerce à tout prix nous sommes des empêcheurs de tourner en rond, mais quand un virus arrive d’Asie pour semer la mort, on se rappelle soudainement l’importance des frontières et de la douane. Temporairement. Parce que malgré l’urgence sanitaire, l’administration poursuit la mise en place de ses réformes mortifères à marche forcée, sans dialogue social réel après son refus d’accéder à la demande de toutes les organisations syndicale pour les suspendre le temps de la crise sanitaire.

Vous-mêmes convoquez un CTSD, qui aura lieu en mode très dégradé, alors que la directrice générale avait pris son parti d’annuler le CTR également prévu sur la période. Et pour quoi ?
Essentiellement un projet modifiant le régime hebdomadaire du bureau de Grenoble, projet que vous avez élaboré en confondant vitesse et précipitation, la preuve en est votre proposition d’accueillir du public sur un horaire de fermeture du bureau...

Aussi, aujourd’hui nous vous le disons avec force :

Le monde que la majorité politique actuelle dessine, nous n’en voulons pas.
La Douane qu’ils imaginent, nous la rejetons de toutes nos forces. Elle serait inefficace, partiale et vendue aux intérêts des plus gros, tout ce que, en tant que fonctionnaires et citoyens, il est de notre devoir de récuser.
Assez de pseudos réformes !
Assez de casse permanente de l’administration !
Assez de l’incompétence érigée en système au plus haut niveau du pays !
Les défis qui attendent notre pays nécessiteront du pouvoir politique de bien plus grandes ambitions intellectuelles qu’une simple application des vieilles lubies idéologiques des années 80.

Lyon, le 17 décembre 2020

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