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moikidy voyant ses troupes revenir les mains vides réunit ses chefs d’équipe : il était pour lui
inconcevable de ramener moins et de voir baisser les performances. Il considéra que la horde
était mal organisée, que les chasseurs-cueilleurs prenaient trop leurs aises, qu’on les avait
sûrement mal habitués. De champions hier, ces hommes et femmes devenaient moins que rien.

Dorénavant il allait prendre les choses en main, et leur montrer comment
on obtient des résultats.

Sémoikidy décida donc du moment et du lieu où les chasseurs devraient
partir. Ceci évidemment sans tenir compte de leurs obligations ou autres
sujétions familiales (éh oui, déjà à l’époque) ni même des contraintes
environnementales.

Fini la concertation, un seul but à atteindre, faire mieux que les autres.

Mais paradoxalement, les choses empirent, pas le moindre petit morceau de renne
ou de « mammouthon ». Les buissons restent désespérément secs et les
gibecières complètement vides.

La prochaine réunion des tribus approchant, Sémoikidy prend l’auroch par les cornes et décide
d’un nouveau plan. Il crée des équipes et pour renforcer la « cohésion « de ces groupes il réunit
des personnes qui n’ont pas d’affinités. Pour être sûr de ne pas se tromper il fait cela sans
concertation. (Ainsi ne sachant pas si elle peut vraiment faire confiance à ce jeune chasseur,
cette ancienne-cueilleuse sera beaucoup plus vigilante quand le tigre à dents de sabre va
attaquer.) Et puis trop de solidarité pourrait les pousser à se rebeller…

Ah oui, il faudra qu’il en informe ses chefs d’équipe demain quand les escouades seront
constituées.

Ainsi donc, désabusés, les membres de la tribu qui ne savent plus trop s’ils sont chasseurs ou
cueilleurs vont partir chasser un gibier qui passe ailleurs, chercher des fruits qui ne poussent
plus avec des gens qui leur adresseront à peine la parole et à qui ils n’oseront pas tourner le dos.
Ce dont ils sont sûrs c’est de la colère du chef quand ils reviendront encore une fois bredouille.

A moins qu’un vieux mammouth malade, perdu, sans odorat, sourd et aveugle vienne se jeter
dans leurs filets.

Et alors le chef pourra dire qu’il avait raison. Car le chef a toujours raison.

Toute ressemblance avec des situations réelles ou avec des personnes existantes ou ayant
existé ne saurait être que fortuite et involontaire… ou pas...à vous de juger
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