Ce mercredi 25 janvier 2016 , les organisations syndicales douanières ont été invitées à rencontrer le rapporteur du projet de loi sur la sécurité publique, Monsieur GOASDOUÉ, lors d’une table ronde. Ce projet de loi doit être adopté avant la fin de la session parlementaire de février 2017.
L’équilibre de cette loi s’inscrit selon deux impératifs juridiques :
Au vu de l’étude jurisprudentielle antérieure, le Rapporteur est confiant sur l’appréciation des juges au vu des circonstances factuelles de l’usage des armes (1) (absolue nécessité et stricte proportionnalité « in rem »).
Si le passage au Sénat ne semble pas poser de difficultés majeures, les craintes du rapporteur concernent notamment une éventuelle future question prioritaire de constitutionnalité qui pourrait être soulevée par un avocat dans le cadre des droits de la défense. Cela pourrait remettre totalement en cause cette loi. Sécuriser ce dispositif demanderait donc de ne pas trop étendre ce nouveau cadre de l’usage de l’arme ainsi que pour l’anonymisation des procédures.
Comme les autres forces de sécurité intérieure, deux articles nous concernent avec pour but d’unifier le régime d’usage des armes, douaniers compris :
1. L’ article 1er de la loi sur la sécurité intérieure sur l’usage des armes par les forces de l’ordre :
Voici la description de l’usage au sein de l’article L. 435-1 du code de la sécurité intérieure :
Dans l’exercice de leurs fonctions et revêtus de leur uniforme ou des insignes extérieurs et apparents de leur qualité, les agents de la police nationale et les militaires de la gendarmerie nationale peuvent, sans préjudice des dispositions de l’article L. 211-9, faire usage de leurs armes en cas d’absolue nécessité et de manière strictement proportionnée :
Cet article reprend, dans un souci de cohérence, les dispositions relatives au « périple meurtrier »
2° Le 2. de l’article 61 du code des douanes est remplacé par les dispositions suivantes :
« 2. Ces derniers peuvent faire usage de matériels appropriés, conformes à des normes techniques définies par arrêté du ministre chargé des douanes, pour immobiliser les moyens de transport dans les cas prévus à l’article L. 214-2 du code de la sécurité intérieure. »
« Les membres des forces de l’ordre mentionnés au premier alinéa sont en outre autorisés à faire usage de matériels appropriés pour immobiliser les moyens de transport, dans les conditions prévues à l’article L. 214-2. »
Nous ne pouvons que saluer cet article qui n’oublie pas les spécificités du contrôle routier comme l’arrêt d’un véhicule en usant de l’arme ou sécurisant le dispositif des herses.
Ainsi, c’est un cadre complet qui est défini pour l’ensemble des forces de sécurité agissant sur le territoire national, et les douaniers n’ont pas été oubliés pour une fois !
2. L’ article 2 de la loi sur la sécurité intérieure sur l’anonymisation des procédures :
A la lecture de ce projet de loi , ce 7 janvier 2017, la CGT avait saisi en urgence la Direction générale en écrivant « nous aimerions savoir si la limitation à "certaines infractions" englobe la totalité des infractions douanières et si de fait les agents des douanes auront la possibilité d’avoir recours à cette anonymisation pour l’ensemble des actes qu’ils seront amenés à rédiger, y compris les actes transactionnels. »
Pas de réponse à ce jour…
Il est inséré l’ article 55 bis au sein du Code des douanes :
« Art. 55 bis. - Par dérogation aux dispositions du chapitre IV du titre II et celles du titre XII du présent code, les agents des douanes peuvent, sous le numéro de leur commission d’emploi, leur qualité et leur service ou unité d’affectation, être identifiés dans les actes de procédure, sur autorisation de leur responsable hiérarchique, qui doit être d’un niveau suffisant, défini par décret, déposer, être désignés, comparaître comme témoins ou se constituer parties civiles en utilisant ces mêmes informations, dans les conditions et sous les réserves prévues à l’article 15-4 du code de procédure pénale. »
Voici la description de l’anonymisation au sein de l’article L. 15-4 du code de procédure pénale :
« Art. 15-4. - I. - Dans l’exercice de ses fonctions, tout agent de la police nationale et de la gendarmerie nationale peut être autorisé à ne pas s’identifier, dans certains actes de procédure qu’il établit, par ses nom et prénom.
Ces dispositions s’appliqueraient également aux agents des douanes et aux agents des services fiscaux habilités à effectuer des enquêtes judiciaires en application de l’article 28-2 du code de procédure pénale dans les conditions prévues au nouvel article 15-4 du code de procédure pénale. Ce projet de disposition permet de couvrir l’ensemble des personnels dont l’identité est susceptible d’apparaître dans les procédures judiciaires dans le cadre de procès-verbaux, mais également de rapports de tout type (surveillance, interpellation, opérations de police technique et scientifique, fiches de mise à disposition, etc.).
« II. - Les juridictions d’instruction ou de jugement saisies des faits ont accès aux nom et prénom de l’agent qui s’est identifié par un numéro d’immatriculation administrative dans un acte de procédure.
« Saisi par une partie à la procédure d’une requête écrite et motivée tendant à la communication du nom et du prénom d’une personne ayant bénéficié des dispositions du I, le juge d’instruction ou le président de la juridiction de jugement décide, après avis du ministère public et tenant compte, d’une part, de la menace que la révélation de l’identité de cette personne ferait peser sur sa vie ou son intégrité physique ou celles de ses proches, et d’autre part, de la nécessité de révéler ces informations pour l’exercice des droits de la défense de l’auteur de la demande, s’il y a lieu de communiquer ces informations. Le procureur de la République se prononce dans les mêmes conditions lorsqu’il est fait application de l’article 77-2 (...)
« III. - Le fait de révéler les nom et prénom d’une personne ayant bénéficié des dispositions du présent article ou de révéler tout élément permettant son identification personnelle ou sa localisation est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende.
« Lorsque cette révélation a entraîné des violences à l’encontre de cette personne ou de son conjoint, de ses enfants ou de ses ascendants directs, les peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et à 100 000 € d’amende.
« Lorsque cette révélation a entraîné la mort de ces personnes ou de leurs conjoints, enfants et ascendants directs, les peines sont portées à dix ans d’emprisonnement et à 150 000 € d’amende, sans préjudice, le cas échéant, de l’application des dispositions du chapitre Ier du titre II du livre II du code pénal.
(1) Seul un jugement de la CEDH aurait condamné des gendarmes sur l’utilisation illégale de l’usage de l’arme (individu en fuite mais non menaçant et menotté).
Pour la CGT, nous sommes bien face à une avancée mais il convient, tout de suite, de couper court aux fantasmes. Nous ne sommes pas face à une anonymisation générale des procédures. Les procédures anonymisées resteront l’exception. N’entreront dans ce cadre que certaines enquêtes, ou certains services, ou certaines procédures qui relèveraient d’un caractère de danger pour la sécurité des agents. Ce n’est donc pas la panacée, mais bel et bien une avancée. Et il serait étonnant que le législateur aille plus loin...
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